Comment créer quand on est en pleine déconstruction ?

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Cette question s’est posée à moi il y a trois ou quatre ans, quand j’ai commencé à m’intéresser aux processus de racisme, et elle est revenue par l’intermédiaire d’un ami auteur.

La position de lecteur ou spectateur d’objets culturels peut déjà poser des difficultés, la déconstruction sociale (racisme, sexisme, homophobie et psychophobie, entre autres) se présentant comme la succession d’étapes plus ou moins faciles à passer.

anigif_enhanced-25230-1406200742-1 On pense que le lectorat c’est ça, mais en fait non !

La plus compliquée de ces épreuves, de mon expérience personnelle, qui peut varier d’un individu à l’autre, réside dans le fait que des films ou des séries que j’appréciais étant plus jeunes véhiculent des imageries problématiques. Je suis par exemple en train de revoir la série Friends ; je n’ai jamais été une grande fan mais cela reste une référence de ma post-adolescence. Bien que relativement (très relativement au final) progressiste en son temps, Friends véhiculent des clichés sexistes mais fait aussi son beurre de blagues homophobes et transphobes (ainsi que grossophobes) Cette ré-évaluation des objets culturels qui m’ont forgée ou qui ont simplement accompagnée ma vie me semble être une étape importante de cette déconstruction ; cela ne m’empêche pas d’apprécier certaines de ces œuvres (et d’en arriver à détester d’autres)

D’un autre côté, cette nouvelle vision permet également de repérer les œuvres qui étaient, de leur temps, réellement progressistes : voir le traitement des personnages féminins dans Twin Peaks, au hasard, plutôt féministe, y compris de nos jours, à mon avis.

La seconde conséquence de cette déconstruction en tant que lectrice et spectatrice, est un rejet de certains produits culturels actuels, que ce soit dès l’apparition d’un Quatrième de Couverture ou d’un pitch (voire d’une affiche de film) ou au moment de la découverte de l’œuvre en elle-même. La première fois que je l’ai expérimenté, c’était en lisant des livres de science-fiction francophones et anglophones dont le sexisme rendait la lecture impossible (alors qu’on peut très bien faire de la SF « de papa » et du pulp sans être sexiste) Ô le nombre de bouquins sur lesquels je me suis entraînée au « lancer de livre sur le mur de la chambre ».

(Je suis toujours en train de regarder Friends en rédigeant cet article et il y a « encore » une situation homophobe… Je vais finir par les compter)

Voilà à peu près l’étape où toute personne qui s’interroge sur les systèmes oppressifs dans la culture se situe assez vite.

On peut en rester là si l’on reste consommateur.

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Vous-mêmes, votre futur lectorat constitué de plein de personnes qui font partie des minorités dont vous allez parler.
Ça fout la trouille…

Comment continuer quand on est créateur ?

Quand j’ai commencé à écrire, inconsciemment, je choisissais de parler de héros masculins, blancs (plus ou moins hétéro), dans une vision profondément sexiste. Quand je suis entrée dans le monde de la fanfiction, celui-ci était encore extrêmement misogyne : on ne pouvait pas aimer un personnage féminin et on pouvait le « basher » dans nos créations sans se faire critiquer, et le concept de Mary Sue s’appliquait à tout et n’importe quoi. Et quand j’ai commencé à écrire « sérieusement », créer un héros consistait surtout prendre le plus large dénominateur commun, pour des besoins d’identification (donc un garçon blanc et plutôt hétéro)

Mais là, parce que j’étais passée par la fanfiction avant, je me suis dit que finalement, le côté hétéro ne me plaisait pas vraiment. Restait le problème du côté garçon. Il a fallu l’arrivée du YA et de la bit-litt pour que j’ose écrire un personnage féminin. Ce pourquoi j’ai beaucoup de mal à ne pas grincer des dents quand des séries comme Hunger Games ou les œuvres de Patricia Briggs par exemple sont critiquées et rejetées comme étant de la « littérature de filles » (expression entendue comme négative), notamment par d’autres auteurs de livres « sérieux » (où on poutre quand même du vampire et du dragon d’ailleurs, donc merci pour le sérieux hein *ironie inside*)

En écrivant des personnages LGBT et féminins, j’ai trouvé une vraie libération, parce que j’écrivais enfin sur des personnages auxquels je pouvais m’identifier moi, comme lectrice et comme auteure. Ça a été l’étape facile.

Vient l’étape difficile : diversifier son panel d’écriture (personnages, situations, milieux sociaux et géographiques) sans faire preuve soi-même d’oppression. L’oppression ne se situe en effet pas uniquement dans le fait de présenter tel ou tel personnage, tel ou tel pays, telle ou telle culture, sous un mauvais jour, mais de les présenter de façon caricaturale ou fétichiste.

Revenons à mon expérience : mes études ont fortement influencé un de mes romans. J’ai fait des études d’histoire de l’art et j’ai étudié le mouvement orientaliste, qui s’associe à la colonisation, au racisme, au fétichisme et à l’exotisme. Que des domaines non safe et surtout ne pouvant faire l’objet d’une création sans déconstruction.

J’ai corrigé un roman reposant sur cette éducation et cette admiration au moment où j’ai découvert les systèmes oppressifs, ou plutôt au moment où ils ont été révélés sous la couche de culture occidentale que j’avais reçue. J’ai encore du mal à déconstruire ces domaines particuliers, notamment en ce qui concerne l’appropriation culturelle.

http://lechodessorcieres.net/quest-quil-y-a-de-mal-a-faire-de-lappropriation-culturelle-ces-9-reponses-revelent-pourquoi-cest-blessant/

(Un article qui parle du concept de façon sans doute plus claire que moi)

Se pose donc les questions qui se complètent : comment continuer à écrire sans contribuer à la répétition de figures oppressives ? Et comment ne pas contribuer à ces répétitions, diversifier son écriture sans faire preuve soi-même d’oppression ?

Je n’ai aucune solution à proposer à cette problématique.

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Oui moi aussi je freak out, hein…

Le fait de « finalement continuer à écrire sur soi pour ne pas se compliquer la vie » ne me satisfait personnellement pas. D’autant que cet argument est souvent suivi d’un « on ne va pas s’amuser à faire du politiquement correct en écrivant sur des minorités non plus ! » (le monde de la littérature a ses gros boulets oui)

Je pense que la première chose à faire, et qui viendra naturellement si l’auteur.e est en pleine déconstruction, c’est la modestie. C’est d’accepter de faire des erreurs et de se faire corriger et critiquer. Qu’un lecteur, relecteur, bêta-lecteur concerné vous dise que tel ou tel aspect de votre œuvre ne fonctionne pas, ce n’est pas plus blessant que quand on vous dit que la structure narrative est pourrie, ou que les dialogues sont insipides (j’ai testé les deux).

Soyons honnête, les remarques de lecteurs qui touchent au cœur d’un texte sont horribles à recevoir et vous font vous remettre en question : qu’il s’agisse de structure, de dialogues, de construction… ou de traitement des personnages et des situations.

Quand quelqu’un me dit que je suis raciste, ce n’est pas une injure. C’est une façon de m’interroger sur comment j’ai reçu mon éducation et sur comment je peux la dépasser pour devenir quelqu’un de meilleur.

La seconde chose à faire est de ne pas se laisser bloquer.

En intégrant qu’il y a plus que Le héros commun, plus que La situation commune, plus que Le pays commun, se voit offrir à nous une multitude de possibilités, un peu comme si on passait de la trousse de toilette brosse à dent/peigne/mouchoirs au vanity de luxe avec trois shampooings (bio) différent, un brosse en bois, du maquillage équitable et un service de massage offert. C’est. Le. Pied !

Même si vos situations de base (une invasion de zombie, une guerre fratricide (ou soricide… sororicide ?) au milieu des dragons ou un thriller steampunk) restent relativement bateau dans le monde de l’imaginaire, vos personnages et vos milieux ont pris une force et une originalité auxquelles on n’avait pas accès avant. C’est encore plus frappant quand on écrit de la fantasy urbaine ou qu’on évolue dans des situations contemporaines, parce qu’on se retrouve à intégrer des complexités sociales qui n’existent pas pour le personnage de mec blanc hétéro lambda.

Sauf que devant ce vanity (ou cette boîte à outil si vous souhaitez parler en bleu/rose :p), on panique.

Je pense que c’est normal, même si je pense aussi que certains auteurs ne se posent pas la question (et tant mieux pour eux s’ils ont cette facilité).

Personnellement, ce choix m’a complètement bloquée pendant quelques temps.

Et si, en écrivant sur un milieu ou une situation que je ne connais pas, je faisais erreur ? Et si je prolongeais les fétiches racistes et sexistes qui me dégoûtent tellement dans d’autres œuvres ?

Et si, et si, et si…

Le blocage, ce syndrome de la page blanche dont parlent avec beaucoup de légèreté les gens qui n’y ont jamais été confrontés, est l’enfer de l’auteur.e. (Non vraiment)

Ici la volonté politique et militante se confronte avec le besoin intrinsèque de créer.

Ce problème de « ne pas se laisser bloquer » me paraît être le plus compliqué, surtout quand on relit les articles sur l’appropriation culturelle et sur l’hégémonie des oppresseurs sur les sujets concernant les oppressés (des hommes qui parlent du sexisme, des blancs du racisme, des hétéro de l’homophobie, etc)

Je suis une fille bi, comment puis-je créer un personnage d’homme arabophone hétéro (par exemple) ?

Je crois que cette étape passe non seulement pas la modestie dont j’ai parlée plus tôt, mais également pas l’empathie. Nous, générations des années 70 ou 80, avons suffisamment digéré de séries « multiculturelles » caricaturales, avons vu suffisamment de documentaires et de reportages à sensations, avons rencontré sûrement assez de personnes concernées, avons lu assez d’articles, de témoignages, avons assez fait jouer notre empathie et notre expérience de vie pour savoir ce qu’il ne faut surtout pas faire… et donc ce qu’il est possible de faire.

Taystee3Oué, faisons des personnages complexes ! Non limités par leurs “image sociale”

Troisième étape, qui se confond avec les autres (les trois se submergent et s’entrecroisent en fait le plus souvent), c’est… lire. Et lire de la fiction (quand on se déconstruit, on lit beaucoup d’articles ou d’essais)

Cela tombe sous le sens quand on est auteur.e, mais bizarrement on l’oublie quand on se frotte aux sujets de la déconstruction et de la diversification.

A priori, selon moi, un des problèmes provient du fait que les éditeurs ne marquent pas « littérature de la diversité » sur les jaquettes (oui moi j’aime trouver ce que je cherche tout de suite !). Et que dans le domaine de l’imaginaire, quand on parle de littératures non occidentales, l’imaginaire lui-même (et notamment l’imaginaire SF) n’existe pas… Noualem Sansal, auteur algérien dans la liste des nominés au Goncourt cette année, a écrit un livre d’anticipation SF, présenté comme une fable dans les médias. À ce niveau-là, difficile de se mettre à la recherche de littérature contemporaine de l’imaginaire non occidentale (elle existe en Extrême Orient mais là ce sont souvent les traductions qui font défaut, mais je laisserai volontiers la parole à des spécialistes là-dessus)

En ce qui concerne les littératures de l’imaginaire occidental ou les littératures occidentales, je pense qu’on commence à avoir accès à plus de choix et plus de lectures. Et comme on ne peut se fier aux couvertures et aux pitchs, autant se fier au bouche à oreille (dans le milieu de l’imaginaire, c’est facile : nous ne sommes pas nombreux)

Le puits sans fin de la diversité se trouve déjà, facilement et à portée de main, en littérature jeunesse. Parce que un des buts de la littérature jeunesse et d’ouvrir l’esprit des jeunes lecteurs et des ados, les éditeurs ont laissé la place très tôt à des sujets plus divers que la littérature adulte. Et je ne vois donc pas du tout d’un mauvais œil (comme d’autres cités au début de cet article) la montée de la littérature YA, si elle permet à des auteur.e.s et des sujets déconstruits (entièrement ou en partie) d’avoir une place dans nos bibliothèques.

Et ce sont ces auteur.es qui nous prouvent à nous, autres auteur.es, que continuer à créer tout en poursuivant sa déconstruction est tout à fait possible.

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Oui c’est possible !

Je m’arrêterai là pour cette réflexion parce que je ne suis pas sociologue et que je risque de me répéter.

J’ai par contre quelques adresses et lectures à partager (je suis une toute petite lectrice, la liste ne sera donc pas longue, mais je pourrai la rallonger au fur et à mesure du temps)

En fiction de l’imaginaire :

Planète à Louer, Yoss.

D’Or et d’Émeraude, Éric Holstein.

Demain, une oasis, Ayerdhal.

Chien du Heaume, Justine Niogret (que je n’ai pas lu mais dont je connais l’impact chez ses lecteurs et lectrices)

L, anthologie dirigée par Charlotte Bousquet.

En fiction jeunesse :

Aristote et Dante découvrent les secrets de l’univers, Benjamin Alire Saenz.

Si j’étais un rêve, Charlotte Bousquet.

Maisons d’édition à surveiller :

La Ville Brûle

Sites à découvrir :

We Need Diverse Books http://weneeddiversebooks.org/

Et sur la question de l’humour (dont je n’ai pas eu le temps de parler ici) :

http://uneheuredepeine.blogspot.fr/2012/08/lhumour-est-une-chose-trop-serieuse.html?m=1 (L’auteur développe le sujet sur plusieurs articles)

Et les humoristes a priori non oppressifs et plus ou moins médiatisés (je ne connais pas assez les chaînes youtube pour vous parler de ceux-là) :

Alexandre Astier

Océane Rosemarie

How to get away with murder – Peter Nowalk ; Shonda Rhimes

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Le fait d’avoir du mal à aborder le cas HTGAWM (How to get away with murder) sur un blog traitant du genre dans la culture populaire ne présume non pas de la mauvaise qualité de cette série mais, au contraire, de sa très grande qualité.

Le pitch est relativement basique : Annalise Keating possède un cabinet d’avocat, très modeste par rapport à ceux auxquels la télévision nous a habitués. Elle est également enseignante à la Fac et, tous les ans, elle prend sous son aile cinq étudiants qui travailleront pour elle. Et l’expression « sous son aile » n’est pas usurpée puisque qu’Annalise va protéger ses étudiants becs et ongles et souvent à leurs propres corps défendant. Les corps s’accumulent, les non-dits, trahisons et petits marchés aussi, jusqu’à laisser le spectateur avec une furieuse envie de regarder la suite (série excellente en cliffhangers)

Jusque-là donc, nous avons à faire à une série policière bien faite, bien rodée et avec ce qu’il faut de suspense et de retournements de situation pour devenir un chouchou des marathons séries que les plus geeks d’entre nous organisons régulièrement.

Là où HTGAWM dépasse ses petits camarades télévisuels, outre une interprétation au top, c’est dans le choix de son casting et de ses personnages.

Reprenons notre calculatrice, même si je n’apprécie pas trop cet outil : sur dix personnages principaux, seuls deux sont des HSBC (HeteroSexuels Blancs Cis… oui j’adore cette nouvelle expression ^^) Trois sont noirs, une est latinos, la majorité du casting est féminin (y compris hors des premiers rôles), un couple est ouvertement gay et nous avons un des premiers exemples de personnage bisexuel assumé et revendiqué.

Et quoi me direz-vous ?

Eh bien rien…

La société dans laquelle évoluent les personnages de HTGAWM n’est pas une société idéale : le racisme a l’air de prendre une part plus ou moins importante de l’intrigue dans la saison 2, un des personnages est biphobique (avec une circonstance atténuante mais tout de même), le machisme est toujours là, etc.

Mais les caractéristiques de « minorité » des personnages ne sont qu’une parmi leurs multiples facettes.

Si Connor est homosexuel, sa principale caractéristique reste une absence totale de confiance en soi, qui n’est pas aidée par sa situation professionnelle et sentimentale (sans spoiler ici)

Chacun des personnages (les étudiants en premier, puis, plus la série avance, tous les autres) ne révèlent que quelques caractéristiques de sa personnalité et chacun réagit à sa manière aux épreuves qu’il traverse.

Le personnage le plus intéressant (même si j’ai un gros faible pour Connor) reste Annelise. Présentée comme un roc inébranlable en début de série, elle se dévoile peu à peu dans ses faiblesses. Elle surprotège ses étudiants et les materne, dans tous les sens du terme (c’est particulièrement flagrant avec les personnages de Wes et Bonnie), et elle protège ses propres expériences et traumas sur son entourage (là encore avec Bonnie, mais il est à parier que ça ne va pas s’arrêter à ce seul personnage)

Sa peau noire, son mariage mixte, ses traumatismes d’enfance, sa bisexualité… Chaque chose la sculpte un peu plus dans toute sa complexité.

Et ce traitement s’applique à tous les autres personnages, il s’applique à ces personnages souvent caricaturés pour correspondre à l’idée qu’on se fait d’une minorité sans aller plus loin que le symbole.

Du coup au lieu de voir HTGAWM comme une série de revendication, on la voit comme un thriller très bien foutu, et de temps en temps on se rend compte : ah tiens, mais si, c’est différent de ce que je regarde d’habitude.

Et ça fait du bien.

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Aristote et Dante découvrent les secrets de l’univers – Benjamin Alire Saenz

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9782266253550

Titre : Aristote et Dante découvrent les Secrets du l’Univers
Auteur : Benjamin Alire Saenz.
Année : 2015 (2012 édition originale)
Éditeur : Pocket Jeunesse / PKJ.
Genre : Chronique adolescente.

Nombre de pages : 361.

Public : A partir de 14 ans

Quatrième de couverture :

Ari, quinze ans, est un adolescent en colère, silencieux, dont le frère est en prison. Dante, lui, est un garçon expansif, drôle, sûr de lui. Ils n’ont a priori rien en commun. Pourtant ils nouent une profonde amitié, une de ces relations qui changent la vie à jamais… C’est donc l’un avec l’autre, et l’un pour l’autre, que les deux garçons vont partir en quête de leur identité et découvrir les secrets de l’univers.

Avis :

Je n’aime pas particulièrement les titres à tiroir,et j’aurai volontiers laissé le livre sur sa table de présentation si la libraire ne me l’avait pas mis d’office entre les mains. Entrée un soir dans le monde et la tête de Ari, entre ses 15 et ses 18 ans, j’en suis ressortie 24 h plus tard, des larmes plein les yeux et l’impression de m’être prise une tranche de vie en pleine tête.

Ari est un benjamin, dernier né, tardivement, d’une famille latinos qui a déjà vécu la violence. Celle d’un frère aîné, fantôme invisible que Ari sait avoir aimé un jour, mais dont l’absence (il est en prison, personne ne parle de lui) le ronge jusqu’à l’obsession. Des parents trop aimants mais réservés, une famille pleine de silence et de secrets, où Ari cherche sa place entre “bon garçon” et “et si j’étais un voyou ?”.

Arrive Dante, son sourire, son statut de fils unique, ses parents aussi latinos mais moins, eux aussi ouverts sur le monde comme leur fils.

Le coup de foudre ? Dans la vie vidée, insensée (sans sens pour lui) de Ari, c’est impossible. Il n’existe pas lui-même, alors les sentiments non plus. Et toute cette colère rentrée de « gentil garçon », cette honte qu’il ne comprend pas, vont le faire souffrir, insidieusement, jusqu’à menacer sa relation avec Dante.

En lecture, on a presque l’habitude des Dante, ces gamins qui se cherchent et se perdent un peu, leur optimisme se prenant la vie réelle avec violence. On a moins l’habitude des Aristote, des silencieux, de ceux qui ne comprennent pas et vivent avec un peur si énorme qu’ils en disparaissent quand il ne la retourne pas contre ceux qui tentent de les approcher.

Aristote et Dante découvrent les Secrets de l’Univers est un livre magistral.

La fin est bouleversante, même si elle peut paraître téléphonée à certains lecteurs.

Et puis, encore une fois l’auteur comprend, qu’avant de tomber amoureux, avant d’assumer l’amour d’un autre, il est des fois nécessaire de se réparer un peu tout seul.

Hannibal – Bryan Fuller

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Attention l’article contient de très légers spoilers.

Hannibal, la série créée autour du personnage de Thomas Harris, a débarqué dans nos petites lucarnes il y a trois ans maintenant. La série s’est achevée, faute d’argent et de producteurs intelligents, il y a deux semaines, après une dernière saison des plus échevelées.

Mais Hannibal la série a-t-elle sa place sur un blog comme celui-ci ?

Au départ, non, ou plutôt, pas forcément : Hannibal reprend les bases du thriller psychologique, très in, hyper esthétisé, un peu élitiste. C’est très beau (c’est même visuellement magnifique) mais cela n’a rien de politique.

Et puis, peu à peu, au fil des saisons et au fil des interviews de Bryan Fuller, on se rend compte que Hannibal opère une petite révolution dans le monde étendu mais finalement peu varié du thriller et de la série de « serial killer ».

Le plus évident peut-être, c’est le nombre de rôles féminins dans un genre souvent assez macho et très masculin. Elles ont chacune leur importance dans la dramaturgie et suivent leur propre histoire sans être systématiquement attachées au héros (William Graham). Alana en est le plus bel exemple puisqu’elle refuse de devenir l’intérêt romantique de Will pour se préserver des (débuts) de délires psychotiques de Graham : une décision adulte qu’on ne voit encore que trop rarement. Les autres personnages féminins sont indépendants, savent réfléchir par elles-mêmes, se trompent, souffrent et combattent de la même façon que leurs comparses masculins.

De plus les femmes ne sont pas glamourisées de façon habituelle. Leur beauté reste très froide et détachée, et même les (très rares) scènes sexuelles sont plus des démonstrations symboliques que des spectacles destinés à l’oeil masculin. Hors de ces scènes, la nudité démontre plus une position de domination/provocation qu’un simple étalage destiné, encore, au spectateur masculin (c’est particulièrement frappant dans la première apparition de Freddie, la journaliste, mais également dans les scènes très tendues entre Bedelia et Hannibal).

Il n’y a pas de viol. Pour une série sur les serial killer, autant dire que c’est une exception. Le seul cas d’agression sexuelle est implicite, non montré, et le coupable est puni directement par sa victime et pas par un « homme sauveur ». Bryan Fuller a affirmé à plusieurs reprises que cette absence de viol était complètement voulu, qu’il souhaitait prouver qu’il était tout à fait possible de faire peur, et notamment faire peur à des personnages féminins, et les tuer et faire souffrir, sans avoir besoin de ce genre d’ « outil dramatique ».

Je l’avais déjà souligné en parlant de Bedelia dans un précédent article, mais l’attraction sexuelle que Hannibal opère sur certains personnages ne constitue pas non plus une différence de traitement entre homme et femme puisqu’il séduit de la même façon Bedelia, Alana et Will. Et que, si on ôte l’aspect sexuel/sensuel, absolument tous les personnages sont séduits par lui, à deux exceptions notables, le duo des Freddie (Freddie Lounds et Frederick Chilton)

Si on revient à l’aspect homosexuel de la série ; là où Harris avait été critiqué pour son traitement de la transexualité dans Le Silence des Agneaux, ici on peut dire que Bryan Fuller a passé les obstacles avec succès. La relation entre Hannibal et Will n’est jamais critiquée en tant que relation homosexuelle, mais comme relation dominant/dominé dangereuse. Et encore, tout le monde en profite bien.

Quant à la bisexualité d’Alana et sa relation avec Margot Verger, elle est normalisée au possible, sans critique, sans soulèvement de sourcil, traitée avec la même distance et froideur que tout le reste.

Il est compliqué de parler des aspects politiques et engagés d’Hannibal parce que tout est filmé de la même façon, sans prise de position, la série ne prenant réellement de la chair qu’à la fin de la saison 3. Le parallèle entre l’attirance entre Will et Hannibal et le corps montré et torturé du Dragon Rouge paraît presque un peu « trop » au regard de l’aspect glacé du reste de la série.

En fait, en filmant son histoire d’abord pour la raconter et sans revendication spécifique, Bryan Fuller opère une révolution qui n’a l’air de rien. Et qui n’en est pas moins des plus efficaces.

Et puis c’est très beau quand même.

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Am I normal yet? – Holly Bourne

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Titre : Am I normal yet?
Auteur : Holly Bourne.
Année : 2015.
Éditeur : Usborne Publishing Ltdl.
Genre : Chronique adolescente.
Note: non traduit en français pour l’instant.

Nombre de pages : NR.

Public : A partir de 14 ans

Quatrième de couverture :

All Evie wants is to be normal. And now that she’s almost off her meds and at a new college where no one knows her as the-girl-who-went-nuts, there’s only one thing left to tick off her list… But relationships can mess with anyone’s head – something Evie’s new friends Amber and Lottie know only too well. The trouble is, if Evie won’t tell them her secrets, how can they stop her making a huge mistake?

Avis :

Le choc.
Quand on commence à lire une chronique ado, ou même un livre “destiné aux filles” (eurk), il y a toujours des tropes, des constantes auxquelles on s’attend et qu’on sait d’avance qu’on va détester :
– avoir un petit réflexe bizarre (se ronger les ongles, se mordre la lèvre, manger 2l de glace tous les soirs), c’est mignon (ça ne l’est pas)
– vouloir sauver son copain trop mignon parce qu’on est la seule à le comprendre, c’est romantique (ça ne l’est pas)
– être aimée, c’est la solution à tout (ça ne l’est pas)
– partager ses souffrances avec quelqu’un qui vit les mêmes, c’est super chouette (ça ne l’est pas)
– les parents qui te frustrent sont des mauvais parents et ils ne comprennent rien (ils comprennent très bien)
Et ainsi de suite.
Ces tropes que l’on retrouve partout dans la littérature de romance, Holly Bourne les défonce avec allégresse.
Son héroïne n’a pas de réflexes bizarres et mignons, elle est malade, elle le sait et elle en souffre. Et son parcours initiatique (allez, ce terme littéraire n’est pas réservé aux histoires de garçons !) se mange beaucoup d’échec et des prises de conscience qu’il est nécessaire d’avoir. Evie est un personnage extrêmement complexe, et qui réalise, grâce à sa psy, grâce à ses amies, grâce à elle-même aussi, que tout ne se réglera jamais comme dans un conte de fée. Evie n’est pas une rebelle, elle aime Bon Jovi et Twilight, elle cherche une place dans ce monde adolescent où les filles sont des groupies, soumises, résilientes et toujours follement amoureuses.
Ce roman m’a prise aux tripes, certains points se rapprochent tellement de ce que j’ai pu vivre que la lecture a en été difficile par moment.
Mais c’est aussi un roman débordant d’espoir, de combat, de féminisme et des plus belles leçons qu’on puisse recevoir : pas besoin d’être parfait pour vivre, et la normalité n’existe pas.

J’attends la suite avec impatience.

Cindy Van Wilder a rédigé un beau portrait de l’auteure sur son blog 🙂

Si j’étais un rêve – Charlotte Bousquet

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NOTE : pour des raisons de classement, je spoile le livre dans les tags.
Ne les lisez pas si vous n’avez pas lu le livre !!!!

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Titre : Si j’étais un rêve
Auteur : Charlotte Bousquet.
Année : 2015.
Éditeur : Flammarion / Tribal.
Genre : Roman épistolaire.

Nombre de pages : 185.

Public : A partir de 14 ans

Quatrième de couverture :

Lina et Nour sont en classe de seconde : l’une vit à Sofia, en Bulgarie, l’autre vit à Saint-Denis. Sous la direction de leurs professeurs, elles entament une correspondance qui tourne aux confidences et une amitié s’installe. Tandis que Lina se révolte contre la corruption des pays de l’Est, Nour cache un grand mal-être. Elles se soutiennent l’une l’autre, jusqu’au jour où Nour devient distante.

Avis :

Quand j’étais en troisième, notre collège a organisé un jumelage avec le lycée français de Plovdiv, en Bulgarie. L’écart d’âge (nous avions 13/14 ans, nos correspondants 17/18) a fait que j’ai “raté” cette rencontre même si je garde du pays, à peine sorti du pouvoir soviétique, un souvenir inaltérable.
Cet étrange parallèle autobiographique m’a interpelé même si l’histoire de Nour et Lina n’a que peu à voir avec la mienne (mais vraiment ça m’a fait sourire du coup j’en parle ;p)
Nour et Lina nous parle de féminisme, de politique, d’engagement, mais aussi d’angoisse, de lâcheté, de secrets et de souffrance. Lina est l’engagée embourgeoisée qui ne s’en rend pas encore compte, et qui vit, un peu, la vie rêvée  des héroïnes modernes, à la fois très au courant des injustices du monde, et capable de s’en protéger en refermant la porte de sa maison. Nour est (beaucoup) plus secrète et à son secret s’attachent toutes les interrogations du lecteur et de la lectrice : qui est-elle vraiment ? Exclue ? Fille censurée par une famille conservatrice ? Malade ? Lesbienne cachée ?
Qui est Nour et surtout, qu’est-ce qu’elle nous renvoie comme image de l’exclusion ?
Avec une plume qui ne noie jamais ses deux personnages, Charlotte Bousquet nous offre, derrière un roman court et direct, quelques heures de réflexions bienvenues dans une époque où l’identité interroge tout le monde (et où on a tendance à oublier ceux qu’elle concerne directement)
J’en suis ressorti aussi avec quelques litres de larmes en moins (même si cela se finit “bien”

Sense8 – Wachowskis et Straczynski

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Il paraît très artificiel de parler de Sense8 en parlant de chiffres, mais des fois les chiffres font plaisir.

Sense8 tourne autour de 8 personnages qui partagent leurs émotions de façon fusionnelle, de telle manière que, de temps en temps, ils peuvent interagir dans la réalité de l’autre, bien que vivant chacun dans des pays différents, au quatre coins de la Terre. Bien entendu ils sont poursuivis par une entité mystérieuse qui ne leur veut pas que du bien.

Sur ce scénario qui n’étonnera pas les amateurs de science-fiction télévisées (X-Files, Lost, Heroes, etc), les Wachowski et le co-scénariste Straczynski ajoutent leur vision de l’universalité.

D’abord en filmant dans les lieux mêmes de l’action, ce qui est, il faut bien dire, extrêmement rares. Nairobi n’est as un décor désertique situé au Mexique ou au Maghreb, Séoul n’est pas le métro new-yorkais déguisé et grimé (comme c’était le cas pour le Tokyo de Heroes), Bombay n’est pas la reconstruction de temples de carton pâte. L’Islande est vide et Mexico est littéralement plein. Cela se ressent au visionnage (surtout quand on se rend compte qu’un des héros subit une averse de pluie sur une terrasse de Berlin et qu’on se rend compte qu’on a vécu la même chose, au même endroit, il y a quelques années…)

Voilà le premier point.

Le second est d’avoir engagé des acteurs pour la plupart de la nationalité de leur personnage, ce qui fait que, malgré le fait que la série soit entièrement anglophone, à quelques scènes près, ils gardent le débit, l’action, la musique de leurs propres langues : indienne, allemand, coréen et espagnol. Et malgré sa nationalité anglaise, Aml Ameen garde le léger accent d’Afrique noire.

Second point.

C’est avec le troisième que nous allons nous plonger dans les chiffres. Sur 8 personnages, nous avons :

  • Seulement 2 Américains (quelque part ça fait plaisir)

  • Seulement 4 Blancs

  • 4 hommes et 4 femmes

  • 1 femme transgenre

  • 2 personnages homosexuels revendiqués (Nomi et Lito)

  • 2 personnages que l’on peut considérer comme étant LGBT : Will bisexuel, ou du moins assez « fluide » pour jouir en pleine salle de sport d’un baiser très masculin ; Sun, que je vois comme étant asexuelle, mais c’est peut-être une élucubration de téléspectatrice

  • Ah oui, pour en arriver à cette « élucubration », il faut savoir que 2 personnages n’ont aucune romance dans leur vie, et que pour 1 autre, sa vie de couple ne fait pas partie de l’histoire en elle-même.

Ajoutons que la transexualité de Nomi n’a aucune incidence sur l’histoire centrale, et que la caractéristique qui la fait le plus interagir avec ses compagnons est son activité de hackeuse.

Comme on le voit, « les chiffres parlent » : Sense8 est une série universaliste ET inclusive.

Rappelons-nous la dernière fois que c’est arrivé…

(Si vous avez des titres, je suis preneuse)

Ensuite, enfin, petit bonus, des caractéristique habituellement dévolues aux hommes (l’art du combat, l’esprit scientifique et le piratage) sont confiées à des femmes (respectivement Sun, Kala et Nomi)

Après, quand est-il de la qualité de l’histoire ?

C’est sans doute là que le bas blesse. Si j’ai été happée par Sense8, je comprends que beaucoup de personnes aient pu lâcher.

En effet les scénaristes ne souhaitent pas plonger directement leurs personnages dans l’action. Et à la fin de la saison 1, seuls 3 sont directement concernés par la mystérieuse organisation qui veut les tuer : Will, le flic, Nomi, la hackeuse, et Ryley, la musicienne (que je trouve être le personnage le plus faible de l’histoire, parce qu’elle se laisse porter par les faits sans vraiment agir, à mon sens)

Les autres sont là pour aider mais vivent aussi leur vie à côté, même si on sent que quelques rouages se mettent en marche. Nous assistons par exemple aux affres de la célébrité de l’acteur Lito, obligé de cacher son homosexualité, et ça peut paraître long.

Cependant je me suis laissée complètement emportée par ces histoires « parallèles », avec la curiosité sans cesse renouvelée de voir quand, quand ces personnages encore à la marge vont plonger dans l’action principale.

Vivement la deuxième saison !

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14 Juillet 2015 – Rappel

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Femme, réveille-toi; le tocsin de la raison se fait entendre dans tout l’univers; reconnais tes droits. Le puissant empire de la nature n’est plus environné de préjugés, de fanatisme, de superstition et de mensonges. Le flambeau de la vérité a dissipé tous les nuages de la sottise et de l’usurpation. L’homme esclave a multiplié ses forces, a eu besoin de recourir aux tiennes pour briser ses fers. Devenu libre, il est devenu injuste envers sa compagne. Ô femmes! Femmes, quand cesserez-vous d’être aveugles ? Quels sont les avantages que vous recueillis dans la révolution ? Un mépris plus marqué, un dédain plus signalé. Dans les siècles de corruption vous n’avez régné que sur la faiblesse des hommes. Votre empire est détruit; que vous reste t-il donc ? La conviction des injustices de l’homme. La réclamation de votre patrimoine, fondée sur les sages décrets de la nature; qu’auriez-vous à redouter pour une si belle entreprise ? Le bon mot du Législateur des noces de Cana ? Craignez-vous que nos Législateurs français, correcteurs de cette morale, longtemps accrochée aux branches de la politique, mais qui n’est plus de saison, ne vous répètent : femmes, qu’y a-t-il de commun entre vous et nous ? Tout, auriez vous à répondre. S’ils s’obstinent, dans leur faiblesse, à mettre cette inconséquence en contradiction avec leurs principes; opposez courageusement la force de la raison aux vaines prétentions de supériorité; réunissez-vous sous les étendards de la philosophie; déployez toute l’énergie de votre caractère, et vous verrez bientôt ces orgueilleux, non serviles adorateurs rampants à vos pieds, mais fiers de partager avec vous les trésors de l’Etre Suprême. Quelles que soient les barrières que l’on vous oppose, il est en votre pouvoir de les affranchir; vous n’avez qu’à le vouloir. Passons maintenant à l’effroyable tableau de ce que vous avez été dans la société; et puisqu’il est question, en ce moment, d’une éducation nationale, voyons si nos sages Législateurs penseront sainement sur l’éducation des femmes.

Postambule de la Déclaration des Droits de la Femme. Olympe de Gouges. 1791.

Mon nom est colère

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Reverse-Discrimination

Comme vous le savez si vous me suivez depuis quelques temps, ce blog cherche à se focaliser sur les démarches positives concernant le féminisme et les combats LGBT+ (entre autres)

C’est pourquoi, hors des critiques de films, livres et Bds, je ne cherche pas à « gueuler haut et fort »

Je ne vais pas faire d’exception aujourd’hui. Et pourtant la colère est toujours là, bien présente, construite sur des années de galère et de harcèlement.

Nous parlons souvent du harcèlement social : celui des publicités et des médias, celui des carcans sociaux, celui des paroles politiques.

Nous parlons moins, peut-être (sans doute), par honte quand nous l’avons vécu, du harcèlement dit scolaire, dus aux profs, mais surtout du aux camarades de classes, à ceux avec lesquels on a pu partager plus de douze ans de vie, et qui vous laisse un goût amer dans la bouche.

Toujours trop et jamais assez, viril, mince, populaire, beau, riche, séduisant, et ainsi de suite.

Ces piques des cours de récréation et des heures de cantine m’ont fait personnellement adoré les cours : les seuls moments de la journée où on me foutait la paix. J’en suis devenue intello. Æ rajouter sur tout le reste.

Je ne me plains pas : ma résilience a sauvé les premières trente années de ma vie. La colère et l’entêtement sont en train de sauver le reste.

Il y a de multiples façon de se reconstruire après la honte, il y a mille manières de créer (ou pas d’ailleurs) Mais dans toutes les personnes que j’ai pu rencontrer, dans le monde littéraire comme dans le monde associatif, ce que je note comme point commun, c’est cette volonté inébranlable de mettre l’Autre dans la lumière. Pas forcément soi-même, parce que la honte reste bien ancrée des fois. Mais les Autres, tous les autres.

Les pas assez blancs, les trop folles, les maladroits (mais pas dans le sens Mary Suesque du terme), les pas finis, les isolés malgré eux, les isolés par choix, les tout seuls et ceux qui se sentent trop seuls.

Bref tous ceux qui n’apparaissent dans les fictions que comme ressort comique ou comme sujet de drame (on aide la personne handicapée, la personne handicapée n’est jamais héros ; on résout le crime de la prostituée trans*, mais la prostituée (ou non) trans* n’est jamais héroïne de sa propre vie)

Pendant longtemps, en fiction, nous n’avons été que des outils de narration.

Il est temps de retourner l’échiquier et de faire valser toutes les pièces.

Ce qui est étrange aujourd’hui, c’est que j’ai voulu exprimer ma colère froide dans un blog (oui encore un) et que dans le même temps ma très chère Cindy Van Wilder exprimait avec force et magistrale démonstration tout ce que je viens d’écrire ici.

La colère est ici : http://parolesdemacho.tumblr.com/

Le discours indispensable est là : https://cindyvanwilder.wordpress.com/2015/07/13/you-look-disgusting-vive-la-diversite/

Bientôt 50 !

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Après près d’un an et demi d’articles, plus ou moins réguliers, nous allons atteindre le 50ème post !

Pour en faire un petit événement, j’aimerai vous donner, vous, chers/chères lecteurs/lectrices, l’occasion de vous exprimer. Et pour rester dans le cadre et la philosophie du blog, voici ce que je vous propose.

hashtag

Il s’agira de m’envoyer une petite phrase, liée à l’art, au cinoche, à la littérature, à l’éducation, bref ce que vous voulez dans le milieu culturel, et qui met en avant ce que le féminisme vous a apporté. Ou vous apporte encore.
Bref donnez-moi de l’optimisme et des sourires, histoire de voir que le combat a aussi ses petites victoires.

Vous pouvez envoyer tout cela, avec votre nom/pseudo, votre âge, votre ville (les deux derniers en option), à :

domudeigiana [at] gmail.com